Le choix des produits est orienté par la prise en compte de six critères, parfois contradictoires. Chaque critère est pris avec le même sérieux

Impact environnemental

Nous préférons les produits issus de pratiques respectueuses de l’environnement.

Local

Quand c’est possible, nous préférons des produits qui ne voyagent pas trop pour nous rejoindre. Déjà une contradiction : certains d’entre nous préfèrent des produits bio qui viennent de plus loin, aux produits non bio locaux, d’autres l’inverse. Ainsi, dans la mesure du possible, plusieurs versions d’un même produit sont proposées afin que chacun puisse faire ses achats en fonction des critères les plus importants pour lui.

Équitable

Nous préférons des produits pour lesquels les conditions de travail et la rémunération des personnes qui les ont cultivés ou transformés sont correctes. Mais nous constatons qu’il n’est pas toujours possible de connaître ces conditions pour les produits que nous achetons.

Le goût

Nous préférons les produits qui ont une certaine qualité gustative.

Le prix

Le prix de vente d’un produit est un facteur éthique aussi important que les facteurs environnementaux. Nous prenons pour acquis dans ce modèle que nous avons tous envie de bien manger, et de manière responsable. Mais souvent, les membres n’ont pas les ressources pour acheter la « meilleure » version de chaque produit. La solution est donc de proposer plusieurs versions d’un même article, dont une est financièrement abordable. Cela suppose de proposer des versions dites conventionnelles des produits. Sans cette pratique, il n’y aura pas de réelle mixité sociale dans la coopérative.

Responsabilité de répondre aux besoins culinaires du quartier

La coopérative doit être une ressource pour le maximum de gens qui habitent le quartier où elle est implantée. Elle essaye donc de proposer une gamme de produits qui réponde aux besoins culinaires de tous. Cela implique parfois de vendre des produits pour lesquels seules des versions importées et non bio sont disponibles.

Ainsi, nous pensons que notre supermarché coopératif doit prendre pour modèle l’attitude d’une bibliothèque publique : le but est d’être une ressource pour l’éducation et la culture, mais en même temps ouverte et démocratique. Pas question de limiter la gamme pour que seuls les lecteurs de Mallarmé, Castoriadis, Tchouang-Tseu, Pétrarque, Gertrude Stein, etc. se sentent réellement invités à venir. Pas d’ambiance moralisatrice. Les gens viennent pour lire mais aussi, peut-être, pour discuter ensemble.

La gamme des produits proposés dans ce modèle est en constante évolution. Elle est déterminée par une longue et lente « conversation » entre les membres. Tout membre peut informer les autres membres et débattre avec eux des enjeux qui lui semblent les plus importants (huile de palme, prix élevé de certains produits, mauvaises conditions de travail) en écrivant dans la newsletter, en discutant avec les autres coopérateurs de son équipe, en organisant un atelier. Mais aucun coopérateur, ni un petit groupe de coopérateurs, ne peut interdire la mise en vente d’un produit. Seule une majorité des trois quarts des membres peut obtenir une telle interdiction par un vote en assemblée générale.

Nous pensons que la force majeure du modèle est qu’il réussit à faire coopérer des personnes d’horizons divers et qu’il considère que la question sociale est aussi importante que la question environnementale. Établir une charte, par exemple, qui aurait pour effet d’obliger les membres de la coopérative à avoir les moyens d’acheter exclusivement des produits bio-écolo reviendrait à exclure une population qui, elle aussi, a envie d’accéder à une nourriture de qualité. Le modèle permet de réduire de manière significative les prix des produits bio-écolo, mais ils descendent rarement, même dans les rayons de La Louve, au même prix que leurs équivalents conventionnels.